Or si l'on ne change rien, il n'y aura pas de tourisme Bisounours : des paquebots surpeuplés sillonneront à nouveau les océans, et des gadgets inutiles hanteront les étagères des boutiques de souvenirs. De nouveau, les soirées EVG nous empêcheront de dormir, et les segways nous couperont la route sur le trottoir. N'attendons pas trop des autorités, pour lesquelles l'humanité passe après le profit. Les belles déclarations d'intention entendues pendant le confinement ne sont que vides promesses électorales.
Puisqu'il faudra bien que le tourisme reprenne, qui peut donc influencer son comportement futur, et comment ?
L'autre face du miroir est la demande : c'est vous. Ou nous tous, quand nous voyageons. Ou pas. Ou autrement. Un changement dans la demande a le pouvoir de faire évoluer l'offre, et même - soyons fous - forcer la main des autorités compétentes à faire évoluer le tourisme dans le bons sens. En ce moment même, on dessine des kilomètres de pistes cyclables dans le centre-ville de Budapest : une consécration pour la Masse Critique, un mouvement populaire qui les réclamait depuis des années. #VieuxMotardJaponais
Le moment est venu de se demander ce que nous voulons : continuer à faire partie du problème - que nous connaissons tous - ou nous pencher directement sur les solutions. En partant d'une feuille blanche, que souhaite-t-on retrouver à l'heure du déconfinement et de la réouverture des frontières ? Ca tombe bien, on a du temps pour imaginer - et construire - le tourisme de demain.
La demande détient la clé du surtourisme. A travers quelques exemples, je voudrais faire un tour d'horizon des angles de changement qui s'offrent aux voyageurs.
En tout premier lieu, nous devons im-pé-ra-ti-ve-ment nous débarrasser de la pression sociale visant à DEVOIR ALLER PARTOUT. C'est une ligne de pensée destructrice, à l'origine des foules inutiles et d'un sentiment de manque - car combien peuvent vraiment aller partout ? De tous ceux qui voyagent beaucoup, combien en profitent vraiment ? Et pourtant, le Ich war hier et le j'ai fait ont la dent dure. Apprenez à vous contenter de ce que vous avez déjà, et n'encouragez pas les influenceurs, qui vivent du déséquilibre qu'ils créent entre vos désirs et vos possibilités.
En parlant de possibilités, faisons un petit calcul : soient 7 miliards de personnes qui veulent visiter le parc du château de Versailles (1000 ha soit 10000 m2). Même avec un remplissage pseudo-humain de 2 personnes par m2 et en laissant une heure à chacun, il faudrait 350000 heures (nuit et jour) pour faire passer tout le monde, soit 40 ans ! Et d'ici là une ou deux nouvelles générations seront nées...
Voyez-vous, voyager n'est pas une obligation, et ce n'est pas agréable pour tous. Mais beaucoup d'entre nous sommes encore capables de passer outre la fatigue, les prix prohibitifs, la foule et autres inconvéniences du voyage pour une raison très particulière : y être allé(e). Et de rares photos sans personne dessus, avec beaucoup de patience et encore un peu de chance.
Ironiquement, Internet regorge de photos et de vidéos exceptionnelles réalisées par des professionnels, vides de touristes et avec des angles et des lumières inaccessibles au grand public. Et avec le tourisme virtuel, vous pouvez désormais visiter le monde à moindre frais depuis le confort de votre fauteuil.
Oui, mais rien ne vaut notre propre photo ni notre propre expérience - aussi inconfortable soit-elle ! Serons-nous capables un jour de vaincre notre ego ? L'offre du tourisme doit se remettre en question, certes. Mais la demande aussi.
D'aucuns diront que le guide touristique se tire une balle dans le pied, à encourager les touristes à rester chez eux. Mais vivre du tourisme ne signifie pas adhérer à tout ce qu'il représente. Je suis autant (sinon plus) victime du surtourisme que vous. Aux premières lignes, je suis très bien placé pour voir les problèmes et imaginer des solutions.
Commençons par élaircir le tourisme superflu.
Par exemple, au lieu d'encombrer une foule dans le seul but de prendre un selfie sans même adresser un regard direct au lieu, pourquoi ne pas acheter un panneau vert et une licence Photoshop ? C'est moins cher et laisse tout le monde respirer...
Plus sérieusement, combien de fois ai-je entendu un ami de retour d'un voyage d'affaire se plaindre qu'il n'a eu le temps de rien voir de sa destination ? A l'heure de Zoom et des vidéoconférences, ces voyages inutiles n'ont plus lieu d'être. Les grandes entreprises trouveront bien d'autres options pour leur réductions d'impôts !
Les amateurs de city-breaks partagent sûrement le sentiment des voyageurs d'affaire. Comment apprécier une destination sur un weekend quand un tiers du temps est passé en transit ? Cela vaut-il la peine d'aller dans une ville étrangère juste pour y avoir pris l'apéro ?
A l'autre bout du spectre, d'autres voyageurs préfèrent comme moi la qualité à la quantité.
Plutôt que de faire (ce qui n'a aucun sens) le plus de destinations possibles et de rentrer chez eux épuisés et confus, ils vont organiser des séjours plus longs et vivre leur destination : prendre le temps de rencontrer les locaux, de se promener sans but et hors des sentiers battus, et même prévoir du temps à ne rien faire. Ce sont des vacances, après tout. Le paroxisme de cette idée est la mini-retraite, dont l'idée continue de faire son chemin.
Comme eux, choisissez de voyager hors saison. Si vous n'avez pas de contraintes de dates (vacances scolaires), ou si vos vacances ne sont pas liées à la météo (ski, plage), voyagez quand les autres ne voyagent pas. Si ce n'est pas possible, voyagez où les autres ne voyagent pas : une montagne ou une plage ou une ville plus loin. Vous éviterez la foule, économiserez sûrement de l'argent, et vous serez mieux reçus !
Les vols low-cost sont directement liés aux problèmes de pollution et de surtourisme. Optez pour le train ou l'autocar pour les trajets courts : le temps de voyage total est le même. Certes, ce voyage sera rarement rapide, confortable et ponctuel à la fois. Mais vous éviterez le stress des aéroports et regagnerez au passage le sentiment de distance perdu depuis que l'on vole partout. Et gageons que si la demande augmente, la qualité de l'offre suivra. L'homogénéité des réseaux en Europe n'est pas pour demain, mais elle est possible.
Le P2P a révolutionné l'hébergement, et permet de louer à moindre frais des appartements privatifs. Mais l'abandon d'un de ses principes formateurs (le propriétaire est censé louer une partie des lieux qu'il habite) est la source de bien des maux. A Malte, c'est un crève-cœur de voir les maisons historiques vides et en ruines alors même que des immeubles affreux sont construits à la chaîne pour accueillir les touristes de plus en plus nombreux. Le sauvetage du patrimoine est aussi dans nos cordes, si nous faisons les bons choix.
Une fois rendus à votre destination, d'autres choix étiques se présentent à vous. Ne soyez pas le néofite, portable à la main, qui lance son segway à 20km/h au milieu des piétons ! Les beer-bikes ont disparu des centre-ville pour une excellente raison : ils dérangent les locaux, qui ne sont pas en vacances, eux. Ne m'appellez pas trouble-fête : la derniere fois que j'ai vérifié, on pouvait encore hurler en boite de nuit ! #therhythmofthenight
Enfin, quelque chose me dit que la mauvaise habitude de toucher les statues devrait se perdre tout naturellement après le Covid-19. Une aubaine hygiènique pour la préservation des oeuvres d'art.
Il faut en finir avec les souvenirs qui finissent dans un carton ou à la poubelle - ceci est aussi valable pour les cadeaux, pas plus nécessaires que les cartes postales : tout cela est très mignon, mais ça pollue. Si vous devez vraiment ramener un souvenir, qu'il soit simple et visible, comme un aimant de frigo. Mais le niveau deux est de choisir quelque chose d'utile, dont vous avez besoin en ce moment : une nouvelle agrapheuse, un presse-citron, une paire de chaussettes, quelque chose que vous auriez acheté chez vous tôt ou tard. En revanche, acheter des babioles encourage une industrie inutile et néfaste. Acheter à un vendeur de rue, c'est contribuer à une image négative des zones touristiques et prendre le risque de se faire arnaquer (un iPhone à 100€, vraiment ?). Comme les autorités laissent faire pour des raisons qui leur sont propres, c'est encore à vous que revient l'influence directe sur l'offre et pouvez, sur le long terme, mettre fin à ces pratiques.
Le surtourisme engendre l'apparition de visites low-cost et de guides amateurs, qui constituent une concurrence déloyale aux agences de voyage et aux guides touristiques qualifiés et officiels. Guider n'est pas un passe-temps, c'est un travail et une responsabilité. Par exemple, j'adore utiliser l'humour pendant mes tours, ça égaye les visites et aide à faire passer l'information. Mais J'ai réussi à leur faire croire que n'est pas dans mon vocabulaire.
D'ailleurs, quelle est ma position dans tout cela ?
Toutes les billes ne sont pas dans les mains de la demande, et l'offre peut parfois la devancer. Qui sait, les architectes planchent peut-être déjà sur des sas sanitaires à l'entrée des maisons du futur, avec douche, zone de quarantaine pour la nourriture, et une fente pour boite à pizza incorporée à la porte d'entrée...
Ma contribution dans tout cela est de récompenser les voyageurs qui répondent le mieux aux idées que je viens d'énumérer. Si cela devenait la norme, j'aurai réussi à influencer et la demande, et l'offre ! #cestbeauderever
Puisque le tourisme durable est aussi ma responsabilité, j'offre une réduction de 20% sur le tarif de mes services si vous apportez la preuve que :
✦ Vous restez en Hongrie pour 5 nuits ou plus,
✦ OU vous arrivez en Hongrie par train ou par autocar,
✦ OU vous réservez pour une visite hors-season (1er novembre au 31 mars).
NB : l'offre n'est pas cumulative.
A bientôt je l'espère en Hongrie, dans les meilleures conditions possibles.
Ivan Alleaume
www.valamivan.com
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